jeudi 23 janvier 2020

La faillite du système électrique

Jean Pierre Riou

Le réchauffement climatique n’est pas un long fleuve tranquille.Au prétexte d’ensoleillement ou d’hivers moins rigoureux, il serait illusoire d’en attendre une économie de besoins, ou une garantie de  production des énergies renouvelables.Car des froids extrêmes et prolongés restent à craindre. Et une pénurie d’alimentation électrique menacerait du pire.

Les cycles du climat

Par delà l’élévation régulière des températures, le climat est affecté par diverses oscillations cycliques [1] liées aux différences de température des océans et des pressions atmosphériques.
Certaines sont multidécennales, comme l’oscillation multidecennale de l’Atlantique (OMA) [2] qui suit un cycle de 50 à 70 ans. 
Entre les différentes parties du globe, ces cycles coïncident à un effet de balancier sur les températures, les précipitations et la circulation des masses d’air et d’eau.
L’oscillation nord Atlantique (NAO), qui affecte les masses d’air sur une large partie de l’Europe, est liée à la différence de pression atmosphérique entre la ville de Lisbonne et celle de Reykjavik. 
Les anomalies de ces différences modifient l’équilibre entre la dépression d’Islande et l’anticyclone des Açores.
Lorsque l’indice de ces anomalies est positif, il garantit un hiver doux humide et venté, tandis qu’un indice négatif correspond à une moindre différence entre l’anticyclone des Açores et le « creux » d’Islande, qui place l’Europe du Nord sous l’influence de l’anticyclone de Sibérie, et réduit la force des vents d’ouest.[3], 
Presque tous les pays européens connaissent alors un manque de vent [4]. Un NAO négatif provoque également un temps orageux et nuageux autour de la mer Méditerranée, impliquant un faible rendement de l’énergie solaire.

Quand un ciel couvert et glacial fige un continent

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https://www.europeanscientist.com/fr/energie/la-faillite-du-systeme-electrique/ 

jeudi 16 janvier 2020

SRADDET Bourgogne-Franche-Comté

Contribution à l'enquête publique sur le SRADDET de Bourgogne-Franche-Comté

Jean Pierre Riou  

Contribution déposée sur le registre dématérialisé de l'enquête, close au 16 janvier.
 
Je suis hostile à l’ambition de développement éolien du SRADDET de Bourgogne Franche Comté et tiens à apporter les précisions factuelles qui suivent concernant la motivation de mon avis

Dans « L’hyper-ruralité : valoriser sa rareté ou la priver du peu qui lui reste ? »[1] j’avais publié le contenu de mon audition devant le groupe de travail Aménagement du Territoire du Sénat du 1er décembre 2016[2]. Je m’efforce d’y montrer que le prix a payer pour sa banalisation et son artificialisation ne sera pas circonscrit à ces territoires ruraux mais affectera également toutes les petites métropoles qui y puisent leur identité et viennent s’y ressourcer.
Et que ce prix est bien plus considérable qu’on imagine souvent, car il accélère notamment la désertion des centres-villes des agglomérations dont le territoire a perdu son attrait.

Un panneau publicitaire n’est ni beau ni plus laid en soi qu’un rond point, une zone commerciale ou même une usine. Mais leur multiplication dénature assurément les territoires de leur implantation en modifiant leur identité.
Et c’est le fait d’en être préservés qui fait la rareté des territoires hyper-ruraux de notre région.
Son absence notoire de vent implique la nécessité des plus hauts modèles d’éoliennes.
Or leur impact visuel n’a rien de subjectif, et le rapport Burette de 2004 précise « En pratique, l’impact visuel croit exponentiellement avec la hauteur de l’éolienne. De nombreux calculs sur des exemples réels montrent, qu’en moyenne, l’impact visuel double lorsque la hauteur de l’éolienne augmente de 10m. L’impact visuel d’une éolienne de 150 mètres est 300 fois supérieur à celui d’une éolienne de 50m, alors qu’entre les deux, le rapport de puissance n’est même pas de 1 à 10 »
La rotation des pales ajoute à cet impact en dissuadant l’œil de s’en détourner.

Une étude conjointe de l’Institut Leibnitz et plusieurs universités allemandes, de janvier 2019, et portant sur plus de 2,7 millions de transactions entre 2007 et 2015 [3] a établi une dévalorisation immobilière de 23% sur les habitations rurales anciennes (antérieures à 1949).
Elle corrobore celle de la London School of Economics [4] qui portait sur 12 ans de transactions.
Et force est de convenir de l’interaction entre cette dévalorisation immobilière et celle de leur territoire, transformé en zone industrielle sans emplois.

En second lieu, l’Allemagne a montré que des moyens intermittents ne permettaient pas de réduire la puissance installée en moyens pilotables. Et quels que soient ses records ponctuels de production éolienne, elle a conservé la totalité de ses moyens thermiques en remplaçant un peu de nucléaire et de charbon par la puissance strictement équivalente de gaz et de biomasse. Car les gestionnaires de réseaux allemands misent sur une garantie de production inférieure à 1% de la puissance installée pour les éoliennes, et, bien entendu, sur 0% pour le solaire.

Les économies d’énergie et la gestion de la flexibilité de la demande permettent de réduire cette puissance pilotable.
La flexibilité des centrales nucléaires leur permet de suivre au plus près les variations saisonnières et journalières de la demande. [5] Mais cette flexibilité est désormais dévoyée vers le suivi de la production intermittente avec pour résultat d’en affecter la rentabilité et de ruiner le marché du MWh qui s’effondre jusque des prix négatifs quand le vent souffle. Le rapport du gestionnaire du réseau européen (ENTSOE) sur le passage de l’hiver 2019/2020 est catégorique à la fois sur cet effacement de nos centrales nucléaires et sur le risque de rupture d’approvisionnement français et belge en cas de températures inférieures à moins 5°, même en cas d’importations disponibles.

Je me suis efforcé d’ étayer cette description de la situation lors de mon audition de juin 2019 par la commission d’enquête sur les énergies renouvelables de l’Assemblée Nationale présidée par Julien Aubert.
Et j’ai rendu publiques, dès le lendemain, toutes les sources des documents incontestables qui en appuyaient l’analyse. [6]

En tout état de cause, cette commission a conclu à l’inefficacité des énergies renouvelables intermittentes pour participer à la baisse des émissions de CO2(eq) du parc français de production d’électricité. Celui-ci étant en effet décarboné à plus de 90% depuis un quart de siècle grâce à son mix nucléaire/hydraulique.

L’injection croissante d’intermittence amènera fatalement une dépendance accrue au gaz, pourtant contraire aux objectifs affichés du SRADDET, les quelques 3 GW charbon restant n’étant plus qu’anecdotiques.

En troisième lieu, la « valorisation des territoires » par les retombées fiscales liées aux éoliennes semblent le moteur essentiel de leur acceptation, et même de leur engouement.
Le document ADEME AMORCE de décembre 2017 « ‘L’élu & l’éolien » chiffre à 10 000€/MW la totalité des retombées fiscales pour les différentes collectivités. Et fait état d’un retour d’expérience de 2000€/MW pour le loyer.
Mais parallèlement, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a évalué le surcoût des éoliennes pour l’année 2020 à 1,1 milliard d’euros.
En admettant une puissance moyenne de 17 GW éoliens sur l’année 2020,  à partir de la base des 15660 MW installés en janvier 2020, le surcoût éolien représentera une moyenne de 66 000€ par MW installé.
Soit infiniment plus que ce qui est reversé aux territoires, sous forme d’une curieuse « revalorisation », prise, en fait, dans l’autre poche via les factures d’électricité et de carburant..

Il semble fâcheux que l’information du public visant l’acceptation des éoliennes dans les territoires ruraux n’ait pas bénéficié de la transparence de tous ces éléments car la contrepartie est la détérioration de son cadre de vie.

L’éolien allemand connaît aujourd’hui un effondrement sans précédent et des milliers de suppressions d’emplois, en raison notamment de l’opposition des populations. Pour en améliorer l’acceptabilité, la distance d’éloignement de 1000 mètres des maisons a été validée en conseil des ministres fédéraux le 9 octobre 2019 dans le projet de loi sur le climat.
On ne saurait perdre de vue que les lois de l’acoustique impliquent encore un bruit audible de 33 décibels (dBA) à 1000 mètres pour une simple éolienne de 2 MW dès qu’elle produit le tiers de sa puissance nominale (104 dBA) [L1000m = 104  dBA- 11-20 log1000 = 33 dBA]
Or le code de la santé publique, dont sont dispensées les éoliennes) caractérise l’infraction d’une émergence excessive dès le seuil de 30 dBA.


La taille des machines, rendue nécessaire par l’absence de vent dans notre région, devrait inciter le SRADDET a s’inspirer de l’Allemagne pour préconiser cette distance minimum, à défaut de la protection plus efficace et mieux proportionnée de 10 fois la hauteur des machines, en application en Bavière.

L’illusion d’une énergie locale est démentie par les échanges entre Enedis et RTE, qui montrent sans ambigüité que les 2/3 de la production éolienne est refoulée sur le réseau de transport RTE.
Et c’est désormais en fonction des pics de production qu’il faut dimensionner le réseau à grands frais, et non plus sur les besoins de la consommation, ainsi que le montrait déjà le rapport Derdevet pour la présidence de la République en février 2015.
Car le système électrique est étroitement interconnecté et on se doute que les variations de la consommation ne sont pas corrélées aux caprices du vent.

C’est pour toutes ces raisons que je considère que l’ambition éolienne n’a pas de pertinence en Bourgogne-Franche-Comté


jeudi 9 janvier 2020

De quelle transition l'Energiewende est-elle le nom ?

De quelle transition 
l'Energiewende est-elle le nom ?


Jean Pierre Riou

L’Allemagne a entrepris d’ériger la production d’électricité intermittente en modèle. Ce qui ne manque pas de poser des problèmes de coût et de sécurité. Alors que son kWh reste l’un des plus sales et des plus chers d’Europe, un regard détaillé sur son objectif à long terme permet d’en clarifier les enjeux.

Le ministre fédéral de l’économie et de l’énergie, Peter Altmaïer, en avait chiffré le surcoût à 1000 milliards d’euros à horizon 2022.
Et c’est à une facture bien plus considérable qu’il faut désormais s’attendre, car l’Allemagne est encore loin du bout de ses peines.
Repoussant sa sortie du charbon au moins à 2038, sans être encore parvenue à fermer un parc nucléaire pourtant modeste (21 GW en 2003).
L’étude (2019n° 01)* de l’Institut d’économie d’énergie de l’Université de Cologne (EWI), pour le Ministère de l’économie et de l’énergie de Rhénanie du Nord-Westphalie, permet de détailler l’usine à gaz dont cherche à accoucher cette Montagne, à horizon 2050.
Avec :
Un parc éolien/solaire 4 fois plus puissant que notre parc nucléaire actuel
Un recours accru au gaz quel que soit le scénario
Des moyens mobilisables à tout moment quasiment inchangés
Des émissions de CO2 de plus de 100 millions de tonnes par an
D’autre part, l’éolien, qui en est le fondement, semble déjà traverser une crise historique, tandis que les réserves mondiales de gaz laissent augurer de sérieuses tensions pour son accès avant 2050.
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