Altération de l’activité
corticale due aux infrasons
Effets physiologiques des perceptions subconscientes
Jean Pierre Riou
Grâce
à l’imagerie médicale par résonance magnétique, une étude allemande a mis en évidence le
mécanisme des effets physiologiques et psychologiques des infrasons de puissance
inférieure au seuil de l’audition.
Les effets des
infrasons objectivés par l’imagerie médicale
Le
rôle des cellules ciliées externes dans la cochlée (OHC)
dans la perception subconsciente d’infrasons bien inférieurs au seuil de
l’audition est documentée dans la littérature scientifique. Notamment par
les travaux d’A. Salt sur leur lien avec la sensation d’angoisse.
Une
équipe de chercheurs allemands des Universités de Berlin, Hambourg et Brunswick
en a précisé l’importance et les mécanismes chez l’homme
en objectivant l’activité corticale et sous-corticale grâce à l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (fMRI) dans une importante étude de 2017.
Son
résumé annonce : « Ces résultats nous permettent donc de
spéculer sur la façon dont une exposition continue à des infrasons subliminaux
pourraient exercer une influence pathogène sur l'organisme. »
Le protocole
Le
protocole de cette étude a permis d’empêcher les harmoniques plus élevées d’atteindre
l’oreille des 14 participants, dont le seuil d’audition du stimulus concerné
(12 Hz) avait été déterminé au préalable. Ces seuils s’échelonnaient de 79dB
SPL à 96,5 dB SPL.
Les
chercheurs ont comparé l’activité cérébrale lors de stimuli subliminaux, déterminés pour chacun à 2 dB sous le seuil d’audition (near-threshold
condition*), avec des stimuli supérieurs à ce seuil (supra-threshold condition),
ainsi qu’en l’absence de tout stimulus (no-tone condition).
Les
participants ne savaient pas s’ils étaient soumis à des stimulations
infraliminales ou à une absence de stimulation.
Les résultats
L’imagerie a
mis en évidence qu’une exposition prolongée à un infrason (IS) clairement perçu
n’entraînait pas d’activation statistiquement significative dans le cerveau,
tandis que les stimuli subliminaux, entraînaient une connectivité locale plus
élevée dans trois zones cérébrales distinctes, rSTG (gyrus temporal
supérieur droit, adjacent au cortex auditif droit, ou RAC), ACC (cortex
cingulaire antérieur) et rAmyg (amygdale droite),
Ces
différences ont été compilées dans la figure 3, reproduite ci-dessous.
Ces résultats
montrent que, contrairement au signal audible, qui ne présente pas de différence statistique significative avec la condition sans stimulus, l’IS subliminal est associé à
des activités cérébrales qui soulignent le rôle de rAmyg dans le traitement de
l’IS.
Ce qui est
intéressant sur le plan des risques liés aux infrasons subliminaux dans la
mesure où celle-ci est notamment connue pour son implication dans les
acouphènes débilitants et l’hyperacousie.
Pour
reproduire les conditions extra laboratoire, cette étude a choisi des
stimulations longues (200s). Elle diffère d’autres études par l’absence d’activité
cérébrale pour des stimuli supra seuil, pourtant clairement perçus par les
participants. Ce qui suggère aux auteurs une adaptation progressive au stimulus
audible, selon laquelle le signal Bold (blood-oxygen-level-dependant,ou signal cortical
d’oxygénation du sang) diminuerait
progressivement.
Cette
adaptation spécifique du cortex auditif avait déjà été documentée sur l’animal.
C’est la
première fois qu’elle est mise en évidence sur l’homme.
Discussion
Ce qui amène les auteurs à suggérer qu'une exposition
persistante à un IS supérieur au seuil peut conduire à une atténuation du
signal via des mécanismes attentionnels, alors
qu'en l'absence d'un percept clairement identifiable, l'activation du STG
resterait élevée.
D’autre part, plusieurs études démontrent que rSFG (cortex frontal
supérieur droit) et rAmyg partagent des connexions fonctionnelles et que
l'activité entre les deux régions a tendance à être négativement corrélée.
Mais
surtout, cette étude montre que le traitement des signaux
subliminaux ne produit pas
seulement des effets physiologiques, mais que « la réponse neurale implique
l’activation des zones du cerveau, qui sont importantes dans le traitement
auditif, mais également dans le contrôle des troubles émotionnels et
psychologiques ».
Les auteurs s’appuient sur une littérature scientifique fournie sur le
sujet pour suggérer les risques d’un signal subliminal prolongé et non résolu, l'amygdale
étant notamment bien connue pour son
implication dans le traitement des émotions, notamment en ce qui concerne le
conditionnement de la peur, mais également dans le contexte plus large des
troubles psychiatriques liés au stress et à l'anxiété.
Et considère :
Ces résultats nous permettent donc de réfléchir à la manière dont un IS subliminal
pourrait causer un certain nombre de problèmes de santé tant physiologiques que
psychologiques, qui n’étaient jusqu’à présent attribués que de manière vague à
l’exposition au bruit dans les spectres de fréquences basses et très basses.
Les cellules
ciliées externes sont connectées à de nombreux sites de traitements corticaux
auditifs et non auditifs.
Fait important, étant donné
que certains de ces centres participent au contrôle de l’attention et à
l’excitation, il a été suggéré que l’activation de cette voie pourrait par
exemple réveiller les gens la nuit, tout en les empêchant de déterminer ce
qui les a fait réveiller.
L’étude évoque le fait que l’activation de l’amygdale peut également jouer un rôle crucial
dans l'enregistrement subliminal. de stimuli «biologiquement significatifs ».
Et conclut
notamment que « De plus, étant donné que la réponse du
cerveau aux IS subliminaux implique l’activation de zones du cerveau,
connues pour jouer un rôle crucial dans le contrôle émotionnel et autonome, un
lien potentiel entre les changements d’activité cérébrale induits par l’IS et l’émergence
de divers effets physiologiques ou psychologiques sur la santé peuvent être
établis.
La régulation transitoire de ces zones du cerveau en réponse à un IS
inférieur ou proche du seuil peut ainsi refléter une réponse initiale au stress
du corps, favorisant ainsi la formation de symptômes à mesure que la
stimulation se répète et qu'un facteur de risque supplémentaire se produit ».
Parmi les sources
pathogènes, l’étude mentionne :
Cependant, les IS étaient également suspectés de promouvoir la formation de
plusieurs symptômes médicaux à part entière allant des troubles du sommeil, des
maux de tête et des étourdissements aux acouphènes et à l'hyperacousie, en
passant par les crises de panique et la dépression, qui sont plus fréquentes
chez les personnes vivant à proximité des parcs éoliens.
* Avertissement : Le protocole décrit en ces
termes, p 5, le stimulus faible ou
« near-threshold condition » :
« For near-threshold condition participant-specific
stimuli with SPLs 2 dB below the individual hearing threshold were chosen”
Ce stimulus, dit « près du
seuil », ainsi précisé à 2 dB en dessous du seuil de l’audition de chacun
des participants sera souvent traduit dans ce texte et la traduction de l'étude par « subliminal »
qui signifie sous le seuil de conscience.
Essai de traduction des résultats, de la
discussion et de la conclusion de l'étude en annexe
http://lemontchampot.blogspot.com/2019/11/annexe-traduction.html
http://lemontchampot.blogspot.com/2019/11/annexe-traduction.html
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