« ENR et climat: nous manquons d’études d’impact » Jean-Pierre Riou (Interview)
Début Mai, nous avons publié une analyse en deux parties de Jean-Pierre Riou et Jean Fluchère, sur la nécessité de faire davantage d’études au sujet de ENR et CO2 évité. A l’issue de cette analyse, les auteurs en concluaient qu’ « Il serait irresponsable d’imposer des objectifs de moyens en faisant l’impasse des analyses nécessaires à l’évaluation de leurs performances en termes de sollicitations des moyens thermiques de soutien et d’émissions supplémentaires de gaz à effet de serre. » Une interrogation reprise par la sénatrice Anne-Catherine Loisier dans une question adressée à la Ministre de Transition énergétique. Soucieux de démasquer les moindres externalités négatives des énergies liées à la transition, Jean-Pierre Riou, auteur de nombreuses publications sur le sujet de l’énergie a remarqué également rapport direct entre éolienne et climat. Des sujets qu’il a bien voulu développer pour nous.
The European Scientist : Pouvez-vous revenir brièvement sur votre analyse entre ENR et CO2 évité.
Jean-Pierre Riou : Les énergies renouvelables (EnR) ont imposé un changement de paradigme au système électrique, qui doit désormais développer ses interconnexions, sa flexibilité et ses moyens de stockage pour accepter l’injection croissante d’une production qui dépend des caprices de la météo, tandis que les centrales pilotables son amenées à moduler davantage leur production pour accompagner leurs aléas.
Or les émissions des centrales thermiques sont corrélées à leur rendement. Et si une longue période ventée est susceptible d’éviter leurs émissions en entraînant leur arrêt pendant plusieurs jours, les régimes partiels et à-coups de fonctionnement, liés à leur suivi de ces aléas, dégrade ce rendement et devrait interdire qu’on puisse évaluer les émissions de CO2 évitées à la seule aune de la quantité d’électricité produite, comme semble le faire RTE, ou à celle de la quantité de fossile consommée, selon le CITEPA, organisme officiel chargé de cet inventaire.
De nombreuses études montrent que la plupart des gaz émis par les centrales thermiques peuvent même augmenter lors de leurs baisses de rendement.
TES. : Vous avez réussi à obtenir l’attention de la Sénatrice Anne Catherine Loisier*. Pensez-vous que la ministre de la transition énergétique va répondre ?
JPR : Force est de rendre hommage à notre démocratie et à la règle systématique des Gouvernements de répondre aux questions ainsi posées par les sénateurs ou les députés. Et j’avoue attendre avec le plus grand intérêt les explications sur l’exactitude du chiffrage du CO2 réellement évité par les EnR intermittentes électriques. Je précise « électriques » car les renouvelables thermiques ont un potentiel bien supérieur et ne présentent pas cet inconvénient d’intermittence de production, ainsi que l’a rappelé la Anne Catherine Loisier dans sa question qui précise « bien qu’on puisse regretter que son effort se soit concentré sur les renouvelables électriques au détriment des renouvelables thermiques ».
Mais j’avoue ne pas bien voir comment la problématique des rendements serait prise en compte, alors qu’il me semble avoir montré que les chiffres de RTE correspondaient à un rendement optimum permanent de chaque centrale.
De la même manière, il est facile de vérifier, à la pompe, l’économie de carburant liée à une vitesse de croisière inférieure, mais on ne peut pas conclure, sans cette vérification élémentaire, qu’on a consommé moins en multipliant les coups de freins et redémarrages, selon le seul paramètre que la vitesse moyenne était inférieure.
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