mardi 8 octobre 2024

Effets pervers de l’éolien

 

Effets pervers de l’éolien sur le système électrique

 Jean Pierre Riou

La France, 1er exportateur mondial d’électricité

Dans son bilan du 1er semestre 2024, RTE écrit : au premier semestre 2024, la France a battu son record d’exportations nettes, avec 43 TWh nets (contre 18 TWh l’année dernière à la même période) vers les pays voisins.

Mais sans préciser que la France est le plus gros exportateur mondial d’électricité quasiment chaque année depuis 1990, ainsi que montre le classement d’Enerdata (Electricity/trade/lowest) qui la classe notamment première en 2023 avec un solde export de 51 TWh, loin devant la Suède (29 TWh, et le Canada (27 TWh).

 Notons que son record historique est de 77 TWh (2002) et que selon les douanes françaises, son solde export est de plus de 78 TWh sur les 12 derniers mois.

L’apparition des prix négatifs

Dans ce contexte, les productions éoliennes et solaires abondantes font, chaque fois, écrouler les cours du MWh et multiplient même les épisodes de prix négatifs en contexte de faible consommation. La CRE, qui en publie chaque mois le bilan, compte déjà 338 heures négatives entre le début de l’année et le 30 septembre 2024 contre … 4 heures en 2017.

Notons que les éoliennes dont les contrats sont postérieurs à 2017 sont rémunérées sur la base d’un facteur de charge de 35% (et 70% pour l’éolien en mer), pour ne pas produire dès que le cours est inférieur à 0 €/MWh, ainsi que stipulé dans l’annexe de l’arrêté du 6 mai 2017 .

 

Effet sur le réglage de la fréquence

Dans son bilan de sûreté de 2022 RTE note la dégradation du réglage de la fréquence du réseau européen avec « 78 écarts de fréquence profonds et durables en 2021 ». Ce réglage de fréquence qui est déjà dégradé par la baisse d’inertie du système, liée à la réduction relative des énormes turbo-alternateurs des centrales conventionnelle tournant, tous, de façon synchrone à la fréquence de 50 Hz sur le réseau européen (soit 1500 tours minute), se trouve fragilisé à chaque heure ronde en raison, selon RTE des « écarts de fréquence aux heures rondes [qui] apparaissent lors des modifications des programmes de production et d’échanges transfrontaliers, aux heures rondes ». Toujours dans ce même rapport, RTE considère que « Une vigilance particulière s’impose dorénavant lors de chaque épisode de prix de marché négatifs » pour la raison que les contrats concernés par la rémunération octroyée à ceux qui s’arrêtent alors de produire interrompent tous leur production au passage des mêmes « heures rondes ».

Ajoutons que le gestionnaire du réseau européen Entsoe attire régulièrement l’attention, notamment dans le rapport «  Inertia and Rate of Change of Frequency (RoCoF) » (Inertie et vitesse de changement de la fréquence)  sur les difficultés posées par la baisse d’inertie du réseau en raison de la part croissante des énergies renouvelables qui limite le temps disponible permettant d’éviter l’effet domino d’un écroulement du réseau européen.

Dans ce rapport, l’Entsoe montre que toute variation de la fréquence à une vitesse (RoCof ou Rate of Change of Frequency) supérieure à 1 Hz/seconde ne serait pas gérable et entrainerait l’écroulement du réseau européen. Il identifie une augmentation du risque d’occurrence de tels événements dans sa modélisation des scénarios de développement d’EnRi prévus, ne prétend pas que l’inertie est la seule clé de la sécurité et considère, dans un autre rapport de 2021, qu’il ne lui appartient pas de définir ce qu’est un risque acceptable, car il s’agit d’une décision politique autant que technique.

 

Effets sur le parc nucléaire

D’autre part, il est désormais clairement assumé que le nucléaire est amené à moduler sa production à la baisse lors des fortes productions renouvelables. Le réacteur Cattenom 1 vient notamment d’être arrêté 100 jours sur fond de production supérieure aux besoins de la consommation, au prétexte, selon EDF, d’optimisation de la gestion du combustible. Il devient de plus en plus évident, notamment sur l’illustration ci-dessous, que les modulations à la baisse du nucléaire (en rouge) sont quotidiennement plus profondément corrélées avec les pics de production solaire (en jaune) que chaque nuit avec la baisse de consommation. Et cette corrélation apparait clairement avec les épisodes de forte production éolienne (en gris), de façon claire sur le site de l’Institut Fraunhofer pour le mois de septembre.



 

Dans son rapport Équilibre offre-demande et flexibilités de 2024, RTE prévoit pour 2030 une modulation à la baisse du nucléaire bien plus importante encore, liée notamment aux cycles horaires du photovoltaïque et à la disponibilité des interconnexions pour permettre de refouler les surplus chez nos voisins. Son illustration, ci-dessous, montre ce profil journalier de modulation nucléaire à la baisse notamment pour absence de débouché économique. (page 119 figure 6-72).


Des coûts de maintenance plus élevés

Le parc nucléaire est ainsi contraint à des arrêts et une usure prématurée,selon un rapport d'E. de Vigan selon Montel news qui cite : " La modulation augmente l’effet d’usure, ce qui peut entraîner des coûts de maintenance plus élevés, ainsi que des risques accrus de pannes imprévues », indique le rapport rédigé par Emeric de Vigan, vice-président pour l’électricité chez Kpler, et Alessandro Armenia, analyste de l’énergie."

La cannibalisation du parc de production

La présence du parc éolien français s’apparente ainsi à un véritable dumping, qui plus est subventionné, en raison de son coût marginal nul qui lui donne une priorité de fait qui compromet le modèle économique du nucléaire en cannibalisant la valeur de leurs productions respectives. Ce qui entraîne de plus en plus le nucléaire à s’effacer « pour absence de débouchés économiques ».

Pour une disponibilité éolienne inversement proportionnelle au besoin.

Selon RTE "en-dessous de 15 °C, la baisse de la température de 1 °C conduit à une augmentation de l’ordre de2 400 MW de la consommation." Expliquant pourquoi les pics de consommation ont toujours lieu lors des grands froids. Ces grands froids sont souvent anticycloniques et la baisse de la production éolienne semble malheureusement corrélée avec celle des températures, comme le suggère l'illustration ci-dessous.

Source S. Zaka.




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