Annexe n° 2 à mon audition devant la commission présidée par le député Julien Aubert
http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7769994_5cf8fe6480bbb.impact-economique-industriel-et-environnemental-des-energies-renouvelables--m-ludovic-grangeon-et-6-juin-2019
Constat et prospective
Constat
TOUTES les études s’accordent pour constater le grand nombre de plaintes des « victimes
sanitaires » des éoliennes et la réalité de leurs symptômes.
Les troubles
décrits étant les mêmes dans le monde entier : nausées vertiges angoisse,
acouphènes, perte de concentration.
Une étude de Santé
Canada [1] observe que :
« -Un lien statistique a été établi
entre le désagrément associé au bruit des éoliennes et plusieurs effets sur la
santé auto déclarés par les répondants, y compris l'hypertension, les
migraines, les acouphènes, les vertiges, les résultats obtenus au PSQI
(Pittsburg Sleep Quality Index) et le stress perçu.
-Un
lien statistique a été établi entre le désagrément associé au bruit des
éoliennes et les concentrations de cortisol dans les cheveux, (marqueur
de stress) ainsi que la tension
artérielle systolique et diastolique. ».
De nombreuses
études ont proposé une explication du mécanisme physiologique entraînant ces
symptômes, notamment P. Schomer [2],
A. Salt [3] et M. Alves Pereira [4].
On sait, bien
évidemment, que le caractère psychosomatique intervient dans toutes les
pathologies, ce qui ne peut qu’exacerber l’effet cumulatif lié à l’exposition permanente des riverains d’éoliennes à
leurs flashes lumineux, à la rotation obsédante du rotor, à leurs vibrations
solidiennes, ainsi qu’à l’atteinte qualitative du cadre de vie et du patrimoine
immobilier.
D’autre part, plusieurs
études ont objectivé les conséquences sanitaires de l’exposition d’animaux aux
éoliennes. Notamment des oies [5] et
des porcs [6] en fonction de la
distance de leur élevage aux machines. La proximité des éoliennes a été mise en
accusation en regard de scandales sanitaires pour des chevaux, au Portugal, pour
des visons, au Danemark et pour plusieurs élevages bovins, notamment en France.
Pourtant, bien que l’Académie nationale de médecine ait constaté, dans son dernier
rapport, une atteinte à la qualité du sommeil dans un rayon de 1500 mètres des
éoliennes, ce qu’elle reconnait, par voie de conséquence, comme altérant la
santé, son avis, comme celui de l’ANSES n’objectent que la qualité insuffisante
du niveau de preuves du lien de cause à effet entre éoliennes et symptômes décrits
par les riverains.
Elles évoquent la
responsabilité d’un « effet nocebo », inverse nocif de l’ « effet
placebo », qui résulterait de la peur des riverains d’être affectés par
les éoliennes, de leur opposition de principe aux énergies renouvelables, ainsi
qu’aux études alarmantes sur le sujet diffusées sur le web par les opposants
aux éoliennes.
Ce véritable déni
de la réalité du problème, constant dans chaque affaire sanitaire, a notamment
suscité un rapport accusateur de l’épidémiologiste Carl V. Phillips *, après
qu’il ait lutté contre les mêmes biais dans sa lutte contre le tabac.
Dans son rapport “Properly Interpreting
the Epidemiologic Evidence About the Health Effects of Industrial Wind Turbines
on Nearby Residents” Il dénonce :
« ll y a des preuves accablantes que les éoliennes causent de graves problèmes de
santé chez les riverains, dans une proportion non négligeable et dont
l’origine est généralement liée au stress.
La preuve de cette évidence réside dans des milliers de rapports. »
La preuve de cette évidence réside dans des milliers de rapports. »
Il considère que « Les
tentatives de négation de ces preuves ne peuvent être considérées comme un
désaccord scientifique honnête mais représentent soit une incompétence
grossière soit une partialité intentionnelle. »
Comble d’ironie,
pour tenter de réfuter les travaux de M. Alves Pereira que celle-ci avait
transmis à l’ANSES [P.J.], cet organisme évoque, dans son dernier rapport [7], une étude de l’équipe même que
coordonne M. Alves Pereira et dont les conclusions renforcent au contraire de
façon explicite ses précédents travaux.
En effet, cette
étude met précisément en évidence le rôle de la combinaison des basses
fréquences et des vibrations, propres à la « Maladie Vibro
Acoustique » sur laquelle M. Alves Pereira travaille depuis 30 ans et au
sujet de laquelle elle a été amenée à incriminer les éoliennes.
D’autre part, la littérature scientifique sur le sujet s’accorde pour
considérer qu’à puissance égale, le bruit éolien se situe parmi les plus
dérangeants.
Cette caractéristique, reconnue notamment dans le rapport de l’AFSSET
2008, est illustrée par le graphique ci-dessous extrait de E.Pedersen “Perception and annoyance due to
wind turbine noise”
Et cela notamment en raison de
l’importance des composantes de basse fréquence du bruit éolien, mise en
évidence par de nombreux auteurs comme J.Punch qui montre notamment la
corrélation entre l’augmentation progressive de la puissance des
machines et l’abaissement de leur spectre sonore.
Mais aussi en raison de son
caractère impulsionnel, sa grande variabilité et la circonstance aggravante qu’il émerge la
plupart du temps dans un environnement silencieux.
Ce qui ne peut que poser question
sur les conditions dans lesquelles les éoliennes ont été dispensées du code de
la santé publique, alors que le texte mis en consultation des services de
l’État prévoyait sont strict respect moins d’un mois avant la signature de
l’arrêté du 26 aout 2011 qui les en dispense.
Le classement ICPE
qui accompagne cet arrêté ne saurait en être la raison puisque les éoliennes
sont exclues du régime acoustique ICPE de façon explicite [8],
contrairement à la réponse qui avait été faite à Mme la Sénatrice A.C. Loisier
à la suite de sa question au Gouvernement sur ce sujet [9].
L’amendement défendu
notamment par M. Bal pour le syndicat des énergies renouvelables lors de la
séance du 8 aout du Conseil supérieur de l’Énergie (P.J) et qui réclame cette
dérogation en élevant de 5 dBA le seuil de bruit ambiant à partir duquel la
responsabilité des éoliennes peut être engagée, pose question en matière de
santé publique.
Ce seuil est en
effet de 30 dBA dans le code de la santé publique, et donc, désormais de 35 dBA
pour les éoliennes.
D’autre part, le
passage des pales devant le mât entraîne une modulation d’amplitude importante
du bruit éolien.
A la suite du
volumineux rapport d’un groupe d’experts présenté par le député Chris
Heaton Harris, [10] le Gouvernement
britannique en a reconnu le caractère particulièrement dérangeant et entrepris des travaux visant à réformer la
réglementation.
A l’inverse, la
filière professionnelle française incite à faire remplacer la notion d’émergence
du bruit éolien par celle d’un « indicateur statistique d’émergence »
qui vise à faire disparaître les pics sonores instantanés.
C’est ainsi que les
travaux concernant le projet de norme de mesurage Pr NF 31-114, qui figure
pourtant dans l’arrêté encadrant le bruit éolien (26 aout 2011) ont été
suspendus par faute de consensus entre les différents experts chargés de sa
rédaction, et celle-ci devrait être remplacée par un Guide de mesurage rédigé
par le CEREMA, établissement public à caractère administratif, notamment engagé
dans la promotion des énergies renouvelables. [11]
Enfin, le contrôle
des émergences spectrales des basses fréquences (obligatoire dans le code de la
santé publique) a disparu des obligations réglementaires de mesurage du bruit
éolien, malgré le caractère particulièrement sensible de ces émergences.
Prospective
La protection élémentaire des
riverains exige désormais :
1 Que le problème
soit quantifié, ainsi que l’ont réclamé à plusieurs reprises l’Académie de médecine et l’ANSES, en mettant en œuvre une
étude épidémiologique.
Car le bruit, avec plus de 10
000 décès prématurés par an, est considéré la 2ème cause
sanitaire environnementale. (European Environnement Agency, report 10/2014, p
5).
Ces
décès prématurés sont liés au stress et à l’altération de la qualité du
sommeil.
Ceux
liés au stress provoqué par le bruit éolien ne peuvent plus être occultés par
l’évocation d’un effet « nocebo » dont les riverains d’éoliennes
seraient eux-mêmes responsables.
2 Qu’une méthode de contrôle
des émergences instantanées soit mise en œuvre et que les
inévitables incertitudes de mesurage ne soient pas systématiquement versées
au crédit de l’exploitant, ainsi que c’est actuellement le cas.
Car s’il est en effet logique de ne sanctionner celui-ci qu’en cas de
certitude de dépassement des valeurs réglementaires, la gestion du risque ne
permet pas pour autant que cette incertitude puisse mettre en danger la santé
du riverain.
Cette méthode de contrôle devra permettre de vérifier que les
valeurs réglementaires ne sont effectivement pas dépassées, contrairement
aux pratiques actuelles qui s’apparentent davantage à une méthode statistique
destinée à optimiser les plans de bridages acoustiques mais font disparaitre
dans une moyenne différents pics sonores notamment susceptibles d’interrompre
le sommeil.
3 Le retour de la
protection stricte du code de la santé publique, pour les riverains
d’éoliennes, impliquant le retour du contrôle des émergences spectrales de ces machines,
ainsi que le retour au seuil de 30 dBA de bruit ambiant à partir duquel
l’émergence excessive du bruit éolien peut être caractérisée.
4 La mise en œuvre d’une commission scientifique
pluridisciplinaire et indépendante, chargée d’améliorer les
connaissances relatives aux différentes caractéristiques de l’exposition
chronique aux éoliennes industrielles.
Et notamment dans les domaines de la psycho acoustique, des très basses
fréquences et infrasons, des vibrations, des modulations d’amplitude, du
caractère cumulatif de ces critères et des durées d’exposition.
5 Dans l’attente des
conclusions de cette commission, qu’une distance de précaution de 2 km entre éoliennes et
habitations soit instaurée, ainsi que l’a proposé l’Institut polonais de Santé
publique [12] après l’étude de 487
publications sur le sujet [13].
Ou de 10 fois la hauteur des machines, comme en Bavière.
6 Qu’aucune
opération de « repowering » ne soit autorisée sans nouvelle étude d’impact.
Pour la raison que l’augmentation de puissance électrique des machines
s’accompagne généralement de celle de leur puissance acoustique (jusqu’à 107
dBA pour 3 MW contre 104dBA pour la plupart des 2 MW), mais aussi en raison
d’un abaissement de leur spectre sonore lié à la moindre vitesse de rotation.
Cet abaissement est décrit comme plus impactant pour les riverains par
de nombreuses études. [14]
2 A theory to explain
some physiological effects of the infrasonic emissions at some wind farm sites
4 Conférence en
Slovénie https://www.youtube.com/watch?v=ZXCZ3OyklrE
14 https://hearinghealthmatters.org/hearingviews/2014/infrasound-wind-turbine-hearing-health-effects/
* titulaire d'un
doctorat en politique publique de l'Université d'Harvard. Il a enseigné à
l'Université d'Harvard, l'Université du Minnesotta, l'Université du Texas et
l'Université de l'Alberta. Consultant sur les politiques économiques et
sanitaires, ses travaux sur les méthodes épidémiologiques ont été récompensés
par de nombreux prix, dont le "Kenneth Rothman Epidemiologic Price"
Rapport publié le 18 juillet 2011
dans la revue scientifique http://bst.sagepub.com/content/31/4/303