Article publié en 3 parties dans European Scientist
Par Jean Pierre Riou
Au début était le 100%renouvelable.
Avec l’apparition de machines alimentées par les énergies fossiles, la révolution industrielle a décuplé les perspectives de création de biens de consommation.
Un seul litre de pétrole alimente aujourd’hui davantage de travail que la seule force humaine n’en accomplirait en plusieurs jours. Et fournit, au bas mot, l’équivalent de 20 jours de travail manuel.
Le travail étant destiné à modifier l’environnement pour en tirer des richesses, sous forme de biens de consommation, la corrélation est directe entre la quantité d’énergie consommée et le produit intérieur brut (PIB).
L’évolution mondiale des sociétés contemporaines offre le spectacle d’une ruée vers toutes les formes d’énergie.
Ce qui pose un certain nombre de questions.
Cet article s’efforce d’en identifier certaines pour leur apporter quelques éléments de réponse, au fil de ses trois parties à lire dans European Scientist :
- De l’énergie mondiale en général à la France d’aujourd’hui en particulier https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/focus-sur-lenergie/
- Les spécificités du système électrique : l’Europe sous tension https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/leurope-sous-tension/
- L’énergie et le monde de demain https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/lenergie-et-le-monde-de-demain/
Ce triptyque s'efforce d'envisager le problème de l'énergie dans sa globalité.
Sont propos n’est pas de juger où quand ni comment une décroissance contrôlée des besoins est désirable. Bien que de nombreux éléments suggèrent qu’elle le soit.
Mais de montrer, dans ses 3 parties, à la fois le rôle clé que semble devoir jouer l’électricité dans la problématique de l’énergie et en premier lieu de l’énergie française. Et d’expliquer comment l’injection croissante d’intermittence sur son réseau en fragilise le système et en affecte durablement la rentabilité.
Et pourquoi ce double jeu de l'intermittence évoque l’idée que la récession est à la décroissance ce que le blackout est à la flexibilité. Et que c’est bien l’un et l’autre que l’ambiguïté politique se prépare à déclencher à grands frais.
Pour la raison que cette situation dissuade les investissements de long terme pourtant nécessaires à la robustesse et la sécurité de la production d’électricité ainsi que dans la recherche de toute alternative pérenne.
Ce qui ne manquera pas de favoriser la compétitivité du gaz au détriment de celle de l’électricité, la compétitivité de l’Allemagne au détriment de celle de la France, et celle des pays émergents comme la Chine au détriment de celle de l’Europe.
Car la Chine ne cache pas ses ambitions pour régir les normes de l’économie mondiale et a décidé de dominer les technologies nucléaires les plus performantes, aussi bien de 3ème et 4ème génération que celle, à plus long terme, du Graal de l’énergie : la fusion nucléaire.
Parallèlement, les chinois investissent massivement dans l’éolien européen, écrasent le marché des panneaux solaires dont ils détiennent le quasi monopole des terres rares nécessaires à leur fabrication.
Il serait utile de se rappeler que l’explosion des énergies renouvelables en Chine était sous tendue par l’opportunité du transfert de technologies vers la Chine en contre partie de celle de polluer à moindre coût en Occident.
Alors que son retour de bâton fragilise désormais son système électrique, l’Europe commence à peine à réaliser qu’en rachetant le secteur de son énergie, c’est sur ses forces vives que la Chine s’apprête à mettre la main.
Les hypothèses de stockage futur, pourtant indispensable à la pérennité du modèle électrique actuellement préconisé, n’en sont qu’au stade de démonstrateurs subventionnés depuis maintenant 3 décennies que le problème est posé en ces termes.
Sans même qu’on sache encore quelle technologie sera la plus pertinente.
Et l’Europe de l’électricité échafaude à grands frais une gigantesque usine à gaz sur des sables mouvants en se demandant encore comment résoudre, un jour, le problème de l’injection de ses fondations.
Le formidable atout que peut représenter le nucléaire pour l’avenir de la France a amené le chef de l’État à minimiser les engagements de fermetures de réacteurs tout en repoussant leur échéance.
Dans le même temps, il a annoncé 7 à 8 milliards d’euros annuels destinés à soutenir le développement des énergies renouvelables, notamment le triplement de l’éolien terrestre et le quintuplement du parc photovoltaïque d’ici 2030.
En tentant une complémentarité des 2 tableaux, le chef de l’État a probablement voulu privilégier la l’équilibre et la diversité, en alliant la sécurité de la production nucléaire avec la puissance du soleil et du vent.
Mais ne semble pas avoir pris la mesure des implications qui sous tendent la complémentarité de la chèvre et du chou.