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mercredi 6 novembre 2019

Perceptions subliminales


Altération de l’activité corticale due aux infrasons



Effets physiologiques des perceptions subconscientes

Jean Pierre Riou

Grâce à l’imagerie médicale par résonance magnétique, une étude allemande a mis en évidence le mécanisme des effets physiologiques et psychologiques des infrasons de puissance inférieure au seuil de l’audition.

Les effets des infrasons objectivés par l’imagerie médicale
Le rôle des cellules ciliées externes dans la cochlée (OHC) dans la perception subconsciente d’infrasons bien inférieurs au seuil de l’audition est documentée dans la littérature scientifique. Notamment par les travaux d’A. Salt sur leur lien avec la sensation d’angoisse.

Une équipe de chercheurs allemands des Universités de Berlin, Hambourg et Brunswick en a précisé l’importance et les mécanismes chez l’homme en objectivant l’activité corticale et sous-corticale grâce à l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (fMRI) dans une importante étude de 2017.

Son résumé annonce : « Ces résultats nous permettent donc de spéculer sur la façon dont une exposition continue à des infrasons subliminaux pourraient exercer une influence pathogène sur l'organisme. »

Le protocole
Le protocole de cette étude a permis d’empêcher les harmoniques plus élevées d’atteindre l’oreille des 14 participants, dont le seuil d’audition du stimulus concerné (12 Hz) avait été déterminé au préalable. Ces seuils s’échelonnaient de 79dB SPL à 96,5 dB SPL.

Les chercheurs ont comparé l’activité cérébrale lors de stimuli subliminaux, déterminés pour chacun à 2 dB sous le seuil d’audition (near-threshold condition*), avec des stimuli supérieurs à ce seuil (supra-threshold condition), ainsi qu’en l’absence de tout stimulus (no-tone condition).
Les participants ne savaient pas s’ils étaient soumis à des stimulations infraliminales ou à une absence de stimulation.

Les résultats
L’imagerie a mis en évidence qu’une exposition prolongée à un infrason (IS) clairement perçu n’entraînait pas d’activation statistiquement significative dans le cerveau, tandis que les stimuli subliminaux, entraînaient une connectivité locale plus élevée dans trois zones cérébrales distinctes, rSTG (gyrus temporal supérieur droit, adjacent au cortex auditif droit, ou RAC), ACC (cortex cingulaire antérieur) et rAmyg (amygdale droite),
Ces différences ont été compilées dans la figure 3, reproduite ci-dessous.

 Ces résultats montrent que, contrairement au signal audible, qui ne présente pas de différence statistique significative avec la condition sans stimulus, l’IS subliminal est associé à des activités cérébrales qui soulignent le rôle de rAmyg dans le traitement de l’IS.
Ce qui est intéressant sur le plan des risques liés aux infrasons subliminaux dans la mesure où celle-ci est notamment connue pour son implication dans les acouphènes débilitants et l’hyperacousie.

Pour reproduire les conditions extra laboratoire, cette étude a choisi des stimulations longues (200s). Elle diffère d’autres études par l’absence d’activité cérébrale pour des stimuli supra seuil, pourtant clairement perçus par les participants. Ce qui suggère aux auteurs une adaptation progressive au stimulus audible, selon laquelle le signal Bold (blood-oxygen-level-dependant,ou signal cortical d’oxygénation du sang) diminuerait progressivement.
Cette adaptation spécifique du cortex auditif avait déjà été documentée sur l’animal.
C’est la première fois qu’elle est mise en évidence sur l’homme.

Discussion
Ce qui amène les auteurs à suggérer qu'une exposition persistante à un IS supérieur au seuil peut conduire à une atténuation du signal via des mécanismes attentionnels, alors qu'en l'absence d'un percept clairement identifiable, l'activation du STG resterait élevée.
D’autre part, plusieurs études démontrent que rSFG (cortex frontal supérieur droit) et rAmyg partagent des connexions fonctionnelles et que l'activité entre les deux régions a tendance à être négativement corrélée.

Mais surtout, cette étude montre que le traitement des signaux subliminaux ne produit pas seulement des effets physiologiques, mais que « la réponse neurale implique l’activation des zones du cerveau, qui sont importantes dans le traitement auditif, mais également dans le contrôle des troubles émotionnels et psychologiques ».
Les auteurs s’appuient sur une littérature scientifique fournie sur le sujet pour suggérer les risques d’un signal subliminal prolongé et non résolu, l'amygdale étant notamment  bien connue pour son implication dans le traitement des émotions, notamment en ce qui concerne le conditionnement de la peur, mais également dans le contexte plus large des troubles psychiatriques liés au stress et à l'anxiété.

Et considère :
Ces résultats nous permettent donc de réfléchir à la manière dont un IS subliminal pourrait causer un certain nombre de problèmes de santé tant physiologiques que psychologiques, qui n’étaient jusqu’à présent attribués que de manière vague à l’exposition au bruit dans les spectres de fréquences basses et très basses.

Les cellules ciliées externes sont connectées à de nombreux sites de traitements corticaux auditifs et non auditifs.
Fait important, étant donné que certains de ces centres participent au contrôle de l’attention et à l’excitation, il a été suggéré que l’activation de cette voie pourrait par exemple réveiller les gens la nuit, tout en les empêchant de déterminer ce qui les a fait réveiller.
L’étude évoque le fait que l’activation de l’amygdale peut également jouer un rôle crucial dans l'enregistrement subliminal. de stimuli «biologiquement significatifs ».

Et conclut notamment que « De plus, étant donné que la réponse du cerveau aux IS subliminaux implique l’activation de zones du cerveau, connues pour jouer un rôle crucial dans le contrôle émotionnel et autonome, un lien potentiel entre les changements d’activité cérébrale induits par l’IS et l’émergence de divers effets physiologiques ou psychologiques sur la santé peuvent être établis.
La régulation transitoire de ces zones du cerveau en réponse à un IS inférieur ou proche du seuil peut ainsi refléter une réponse initiale au stress du corps, favorisant ainsi la formation de symptômes à mesure que la stimulation se répète et qu'un facteur de risque supplémentaire se produit ».

Parmi les sources pathogènes, l’étude mentionne :
Cependant, les IS étaient également suspectés de promouvoir la formation de plusieurs symptômes médicaux à part entière allant des troubles du sommeil, des maux de tête et des étourdissements aux acouphènes et à l'hyperacousie, en passant par les crises de panique et la dépression, qui sont plus fréquentes chez les personnes vivant à proximité des parcs éoliens.



* Avertissement : Le protocole décrit en ces termes, p 5, le stimulus faible ou
« near-threshold condition » :
« For near-threshold condition participant-specific stimuli with SPLs 2 dB below the individual hearing threshold were chosen”
Ce stimulus, dit « près du seuil », ainsi précisé à 2 dB en dessous du seuil de l’audition de chacun des participants sera souvent traduit dans ce texte et la traduction de l'étude par « subliminal » qui signifie sous le seuil de conscience.  

Essai de traduction des résultats, de la discussion et de la conclusion de l'étude en annexe 
http://lemontchampot.blogspot.com/2019/11/annexe-traduction.html

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