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samedi 1 juillet 2017

Acoustique des parcs éoliens



Problématique acoustique des centrales éoliennes en France

Jean Pierre Riou

Les contrôles acoustiques des centrales éoliennes en France se réfèrent au projet de norme AFNOR Pr NF S31 114 dans sa version provisoire de juillet 2011 telle que mentionnée dans l’arrêté ICPE éolien 2980 du 26 aout 2011.

Caractéristiques de la norme
Toute norme repose sur le consensus entre les différents intérêts représentés au sein de la commission chargée de la rédiger.
Après mise à l'enquête publique du projet de norme, ce projet devient norme française après avoir impérativement été signée par le Directeur général de l’AFNOR.
A défaut d'avoir satisfait à l'enquête publique et que ne soit apposée cette signature, aucun texte réglementaire ne peut y faire référence.

La rédaction provisoire de ce projet de norme comportait une modification de la notion d'émergence telle qu'elle est retenue dans le code de la santé publique, c'est à dire la caractérisation de l'apparition d'un bruit particulier par dessus le bruit résiduel (ou bruit de fond).

Le projet de norme visait à classer par vitesse de vent, et indépendamment du temps, les niveaux de bruit et à moyenner cette intrusion sonore sur une longue période au sein d'un "indicateur d'émergence", en y intégrant les incertitudes de mesurage (et de calcul).
Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) avait d’ailleurs tenté, sans succès, d’intégrer cette modification de la notion d’émergence dans le texte même de l’arrêté, en proposant un amendement en ce sens lors de la réunion du Conseil supérieur de l’Énergie chargé de se prononcer sur le projet de texte de l’arrêté, le 8 août 2011.
(Source Ministère de l'Environnement, de l’Énergie et de la Mer)
A partir de 2011, les intérêts des riverains ont également été représentés au sein de la commission AFNOR 31 114, notamment par des acousticiens, qui se sont élevés contre cette interprétation jugée biaisée de la définition de l'émergence, qui existe depuis 1996 (norme NF S31 010).
Les différences considérables de résultats selon les méthodes de mesurage utilisées ont naturellement prolongé les débats, qui avaient d'ailleurs débuté de façon officieuse, puisque aucun groupe de travail légal n'avait été lancé par l'AFNOR lors de leur première phase.

Les travaux de la commission S30J éolien ont été interrompus à la demande de la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) en janvier 2017 et le projet de norme abandonné au profit d'un projet de guide de mesurage.
La rédaction en a été confiée au Centre d'étude et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), organisme d’État, qui évite ainsi la nécessité de recherche d’un consensus entre tous les acteurs, notamment les associations de riverains. 
Cette démarche avait été dénoncée dans une lettre ouverte, le jour même de cette décision.

Selon un article d’Actu Environnement « Deux méthodes d’analyse de l’émergence sonore sont encore en discussion à ce jour : une approche statistique basée sur une observation des niveaux sonores de long terme, telle que décrite dans l’actuel projet de norme et une méthode basée sur une approche “instantanée”, qui suppose le respect des exigences “à tout instant” »

Et c’est bien là, en effet,  le fond du problème !
D’un côté le besoin des exploitants, à partir de mesurages complexes, de comprendre comment brider leurs machines pour éviter de dépasser les seuils réglementaires, quels que soient les régimes de vent et les conditions météorologiques, de l’autre, les associations de riverains qui souhaitent que ces prévisions s’accompagnent d’un réel respect de la réglementation.
La première méthode, statistique et de long terme, étant prédictive, la seconde établissant un constat.
Le constat met en évidence la validité de la prédiction, en aucun cas la prédiction ne peut remplacer le constat.
Les riverains n’ont d’ailleurs pas à se mêler de la façon dont les exploitants parviennent à prévoir. Seule, la rigueur du constat, en cas de dépassement des valeurs réglementaires, leur importe.

Et c’est pourquoi ces deux méthodes d’analyse doivent impérativement coexister : celle de constat pour garantir la protection des riverains, l’approche statistique de long terme permettant aux exploitants de brider leurs machines de façon à respecter la méthode de constat.

La difficile maîtrise de la problématique
Contrairement à ce qui semble ressortir de l’article, la filière professionnelle a les plus grandes difficultés à prévoir le bruit d’une centrale éolienne, notamment en raison d’interactions imprévisibles entre éoliennes qui créent épisodiquement des zones de bruit accru, des battements liés aux corrélations/décorrélations de phase, ou dont les turbulences accroissent les émissions sonores. 
Une inversion de température ou la survenue de givre pouvant également entrainer un accroissement considérable de l’impact sonore du bruit éolien sur les riverains.

Pilotage automatique des éoliennes
En évoquant des systèmes interactifs entre les machines et les données acoustiques, l’article d’Actu Environnement fait allusion au système IEAR qui permet à l’exploitant d’optimiser sa production en assurant le bridage minimum permettant, en temps réel, de rester au plus près des seuils limites réglementaires.
La filière éolienne reconnait pourtant que les réglementations du bruit éolien sont généralement fondées sur l’acceptation du fait qu’un nombre significatif de riverains sera dérangé lorsque les seuils autorisés sont pleinement employés (voir document Vestas page 16).
Un tel système interactif impliquera l’augmentation de la durée de ces périodes de gène, tout en dissuadant le riverain de se plaindre puisqu’à priori le seuil réglementaire ne sera pas dépassé.

La dispense du code de la santé publique
Ce seuil réglementaire, autorisé ainsi sur de longues périodes, même nocturnes, a été porté, rappelons le, à 35 décibels au lieu des 30 décibels inscrits dans le code de la santé publique prévus dans le projet de texte, notamment à la demande du Syndicat des énergies renouvelables, dans les conditions décrites par la Sénatrice A.C. Loisier dans sa question au gouvernement.

L’insuffisance des critères de gène retenus
De nombreux critères de gène ne sont pas pris en compte en France (voir 2° partie de http://lemontchampot.blogspot.fr/2017/05/effets-sanitaires-des-eoliennes.html).
Les publications scientifiques récentes (depuis 2011 notamment) ont amené de nombreux pays à réglementer les bruits de basse fréquence des éoliennes, et même leurs infrasons (pris en compte au Danemark à partir de 10 Hz depuis 2011), tandis que la réglementation britannique est en cours de modification pour y proscrire les modulations d’amplitude excessives.
De nombreux riverains regrettent amèrement l’intrusion de ces machines dans leur environnement sonore.
L’Académie de médecine vient de considérer que ces éoliennes perturbaient le sommeil dans un rayon de 1,5 km.

Malgré les efforts indéniables de la filière professionnelle, il est difficile de se contenter de l'affirmation que la problématique acoustique des centrales éoliennes en France serait résolue.


2 commentaires:

  1. Des constructeurs invoquent en plus que les aérogénérateurs
    ne produirait pas par vent de 2 à 4 m/s ,dans ce cas les mesures ne sont pas faites ou plutôt sont caché ; les résultats ?
    pourtant c'est dans ces plages de vitesse de vent que les émergences sont les plus élevées
    la pratique des acousticiens ,faire des études acoustiques part vent très fort ,sous la pluie et j'en passe

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  2. S.Cooper, notamment a effectivement montré la corrélation entre un niveau de gène élevé et le régime de vent très bas où les éoliennes cherchent à démarrer leur production (www.pacifichydro.com.au/files/2015/01/Cape-Bridgewater-Acoustic-Report.pdf, page 214)
    Ces régimes de vent sont souvent décrits par les riverains comme les plus gênants.
    Il est important qu'ils soient correctement traités par un organisme indépendants, et non par des bureaux d'études généralement rétribués par l'exploitant.

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