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mercredi 9 août 2017

Jouer avec le feu

Les risques de l'intermittence

Jean Pierre Riou

En forme d'épilogue au précédent article http://lemontchampot.blogspot.fr/2017/08/ferme-ta-centrale.html

Jouer avec le feu 

L'exception française
Le parc nucléaire français est le seul au monde à faire varier sa production en suivant au plus près les besoins de la consommation, aussi bien sur le plan saisonnier que journalier grâce à 38 de ses 58 réacteurs chargés de varier leur puissance jusqu'à 80% en plus ou en moins en moins de 30 minutes.
 (Source SFEN)

C'est grâce à cette exception française que notre parc thermique est un des plus réduits au monde, en dehors de pays comme la Norvège ou le Costa Rica qui ont la possibilité de tirer l'essentiel de leur production électrique de l'énergie hydraulique, ou d'un mix hydraulique/géothermie comme l'Islande.

Le modèle n'étant pas forcément transposable pour autant.

Malgré cette absence de ressources naturelles, la France n'affiche pas moins le meilleur indice d'efficacité climatique au monde, n'en déplaise aux grincheux.
(Source Climat change performance index)

Les caprices du vent
En Allemagne, la colossale capacité intermittente installée (éolien/solaire), de plus de 90 GW est susceptible aussi bien de battre des records que de cesser pratiquement toute production, comme le montre ci dessous leur bilan de juillet 2017 qui accuse des variations de plus de 45 GW.
(Source https://www.energy-charts.de/power.htm?source=solar-wind&month=6&year=2017)

L'équivalent d'un parc nucléaire hors contrôle

A titre de comparaison, la puissance de notre parc nucléaire est de 63,13 GW, et c'est donc une puissance supérieure encore d'un tiers à ce parc qui se met à produire au gré des caprices de la météo et cesse pratiquement toute production en l'absence de vent et de soleil.
Ce qui a imposé à l'Allemagne de garder en doublon l'intégralité de ses moyens pilotables et pose les problèmes qu'on imagine aux régulateurs de son réseau.

N'est pas EDF qui veut
Pour tenter d'en limiter les effets, la centrale nucléaire de Brokdorf avait été chargée, en 2006, de copier le fonctionnement des centrales françaises et tenter de compenser ces aléas par un fonctionnement en suivi de charge, au lieu du régime optimum pour lequel elle était conçue.
Greenpeace avait publié un rapport en 2011 dans lequel il considérait que cette complémentarité était à risque.
En février dernier, un contrôle périodique de la centrale de Brokdorf a mis en évidence une corrosion anormale et considéré qu'elle datait déjà de 2011. 
L'expertise a attribué cette oxydation aux changements de régimes imposés par ce suivi de charge.
La centrale a dû être arrêtée pour maintenance et vient seulement d'être recouplée au réseau en ce début août.
Le Ministre de la transition énergétique, Robert Habeck a déclaré qu'il ne convenait pas que la centrale puisse continuer ce type de régime irrégulier.

Selon Bloomberg, cet arrêt aurait coûté plus de 100 Millions d'euros à son exploitant Eon.

L'histoire ne précise pas que ce fonctionnement en suivi de charge des centrales nucléaires ne fait pas que les fragiliser mais augmente également la quantité d'effluents radioactifs par rapport à un fonctionnement régulier.


Le même Eon venait de recevoir l'obligation ce même mois de maintenir sa centrale à gaz de Irsching ouverte en réserve du réseau malgré les lourdes pertes d'un fonctionnement infime que ne compensent pas les subventions accordées dans ce cadre, ainsi que nous l'avons évoqué dans le précédent article.

Le développement des énergies renouvelables entraîne un surcoût considérable pour le consommateur. Le graphique ci dessous montre que malgré les annonces que ces énergies deviennent de plus en plus compétitives et moins chères même que les autres, les charges qu'elles représentent sont de plus en plus lourdes


Si de tels surcoûts permettent, du moins, une réduction d'activité des moyens fossiles allemands, c'est jouer avec le feu d'en reproduire le modèle avec nos centrales nucléaires, pour un bénéfice sur lequel il est permis de s'interroger.

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