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mercredi 24 mai 2023

Eoliennes et climat : un remède pire que le mal

 

Éoliennes et climat : un remède pire que le mal

Jean Pierre Riou 

Publié dans Économie Matin 

https://www.economiematin.fr/eoliennes-et-climat-un-remede-pire-que-le-mal

 

« Le battement d'ailes d'un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas ? ».

 

Le fameux effet papillon, ainsi exprimé par K. Lorenz, [1] ne devrait pas manquer d’interpeller tout observateur du climat sur les conséquences de la turbulence de sillage des quelques 900 GW éoliens

 qui affecterait aujourd’hui « toute la structure de la couche limite planétaire »[2]. Et dont il reste à démontrer que les effets bénéfiques sur le climat seraient supérieurs au réchauffement qui leur est aujourd’hui imputé.

 

Un sujet polémique qui détourne la controverse

De nombreuses études ont évoqué l’impact négatif des éoliennes sur le climat. Récemment, un article allemand [3] montrait la corrélation entre l’assèchement des sols et l’emplacement des 30 000 éoliennes d’Outre-Rhin.

Cet article s’appuyait notamment sur l’étude de Gang Wang & al publiée en janvier 2023 sur ELSEVIER ScienceDirect “Wind farms dry surface soil in temporal and spatial variation”.[4]

Mais sa communication sur les réseaux sociaux relayée par « NoTricksZone » [5] ne fut à l’origine, comme c’est souvent le cas, que de considérations sur le caractère sulfureux du site qui la relayait [6] et non sur le fond de son contenu. Climato négationniste, conspirationniste, pro-nucléaire, d’extrême droite.

La messe était dite.

Pourtant, en 2012, déjà, la NASA avait diffusé une étude de Zhou & al [7] qui avait attribué aux éoliennes un réchauffement de 0,72° en 9 ans, selon les observations de ses satellites, sur une région du Texas.

 

Malgré l’abondance de la littérature sur le sujet,  il reste bien difficile à des non spécialistes de se forger, seuls, un avis éclairé dans ce domaine éminemment sensible du développement éolien.

 

L’avis du CNRS

C’est la raison pour laquelle il peut être opportun de revenir sur l’avis scientifique, politiquement correct et rassurant, publiée par le CNRS en 2014 [8], ainsi que sur les sources qui lui avaient alors paru dignes d’attention. En effet, les auteurs de cette étude, publiée sur Nature Communications [2]  appartiennent majoritairement au Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement, à l’Institut Pierre-Simon Laplace des Sciences et du Climat, au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ainsi qu’au CNRS.

 

Cette étude portant sur l’impact climatique des éoliennes européennes s’appuie sur des essais en soufflerie et sur la modélisation de l’évolution du climat selon 3 scénarios :

-          Sans éoliennes (CTL),

-          Avec les 101 GW installés en 2012 (CUR)

-           Et un 3ème scénario (SCEN) avec les 220 GW qui étaient prévus en 2020, afin d’en dégager les effets prévisibles au niveau de notre continent.

 

L’étude illustre notamment la différence entre les résultats de la modélisation du scénario de contrôle (CTL sans éolienne), avec le scénario SCEN (220 GW). Avec la moyenne hivernale, dans la colonne de gauche, et estivale, à droite, pour les températures (ci-dessous).

 



Mais aussi pour les précipitations journalières en mm, (c et d) et la pression atmosphérique au niveau de la mer (e et f) ci-dessous.

 


L’étude se veut rassurante et conclut à des effets certains mais « limités » avec un réchauffement maximum de 0,3° dans certaines régions à échéance 2020. Soit des valeurs « très faibles par rapport à la variabilité naturelle du climat ». Elle compare les conclusions de ses simulations à celles d’autres études qui avaient relevé un réchauffement de 0,7° par décennie dans les zones fortement implantées d’éoliennes, (études 9 10 11) et une réduction des précipitations dépassant 10% (12) .

 

Pour rassurante qu’elle soit, cette étude du CNRS relève cependant que « l'effet atmosphérique le plus direct des éoliennes est une traînée supplémentaire et la génération de turbulence de sillage. » Et qu’en fait « toute la structure de la couche limite planétaire est affectée par la turbulence de sillage des turbines ». Et signale une extraction de la ressource potentielle du vent de l’ordre de 1W/m2 (étude 13 14).

Elle  mentionne également dans les résultats de ses simulations que « Les précipitations hivernales ont une structure plus inégale, mais une réduction significative a été constatée sur l'Europe occidentale atteignant 0,15 mm par jour, soit ~ 5 % des précipitations moyennes. La pression au niveau de la mer subit une variation maximale de 0,5 hPa, reflétant une augmentation du temps anticyclonique à travers l'Europe en hiver. (…) Elle induit de légers changements de circulation moyenne, avec des flux plus au sud sur la partie ouest du domaine et des flux au nord sur la partie est, modifiant ainsi l'advection de chaleur et d'humidité ». Mais relativise en continuant « Les réponses hivernales de la température et des précipitations restent cependant faibles par rapport à leur variabilité interannuelle respective, atteignant ~10% pour la température et 20% pour les précipitations dans certaines zones ».

 

Pour autant, il est troublant de constater la similitude globale entre les modélisations de ces « changements de circulation moyenne »,  « modifiant ainsi l'advection de chaleur et d'humidité » et les récents épisodes locaux de sécheresse, de canicule ou de douceur hivernale dans les régions précisément anticipées sur les illustrations reproduites ci-dessus.

Notamment un déficit de précipitations  dans le sud est de la France, [15] (figure d), des canicules estivales dans la péninsule ibérique et le Maroc [16] (figure b),  ainsi qu’une douceur hivernale peu commune dans le nord de l’Europe, [17] (figure a) tandis que l’est européen bat des records de froid.

Le propos n’étant pas d’en imputer quelque responsabilité que ce soit aux éoliennes, sans autre rigueur scientifique.

D’autres études concluent que les parcs éoliens réduisent la puissance du vent, notamment « ont le potentiel de modifier substantiellement la dynamique atmosphérique et de conduire à des réductions locales de la vitesse moyenne du vent s'étendant jusqu'à plus de 40 km sous le vent du parc» (étude 18) ou observent l’impact des éoliennes sur la croissance de la végétation. (étude 19)

 

Un remède pire que le mal

Mais, aussi faibles que soient les effets des éoliennes sur le réchauffement et la sécheresse, la raison impose de les comparer avec les bénéfices de leur réduction des émissions fossiles.

 

Une étude de 2018 de l’Université d’Harvard [20] s’est chargée de modéliser les variations journalières et saisonnières des températures liées aux éoliennes sur l’ensemble des États-Unis. Cette modélisation s’appuie notamment sur la quantité d’énergie extraite par les éoliennes, leurs effets sur le brassage entre les masses d’air de différentes altitudes ainsi que sur le gradient vertical du vent, c'est-à-dire ses différentes vitesses selon la hauteur.

La valeur obtenue par simulation, d’un réchauffement de 0.24°, correspond aux valeurs observées. L’étude considère que cet « effet de réchauffement est :

-          faible par rapport aux projections du réchauffement du 21e siècle,

-          approximativement équivalent à la réduction obtenue en décarbonant toute la production mondiale d'électricité,

-          et important par rapport à la réduction du réchauffement obtenue en décarbonant l'électricité américaine avec l’éolien ». 

 

L’étude n’ignore rien, en fin de publication [21], des nombreux paramètres qui n’ont pas été traités par ses seuls effets des températures au niveau du sol, comme du fait qu’il s’agit d’un réchauffement instantané qui disparaîtrait avec la suppression des machines, contrairement à l’accumulation du CO2 évité ou de l’éventuel refroidissement de l’Arctique que montrent la plupart des modélisations des effets des éoliennes.

 

Mais à l’inverse, il convient de mentionner qu’un fossé semble séparer les émissions théoriquement évitées par les productions des éoliennes de celles qui le sont réellement [22], en raison de la dégradation des facteurs d’émission des centrales thermiques chargées de compenser leur intermittence, liée à leurs régimes partiels et à-coups de fonctionnement.

La sénatrice Loisier s’est inquiétée de cette différence entre théorie et pratique, liée à la dégradation des facteurs d’émission des centrales thermiques chargées du suivi de charge de leur intermittence, qu’aucun organisme ne semble en charge d’évaluer. [23]

 

Pour conclure

Eu égard à l’évolution spatiale des sécheresses actuelles et aux événements climatiques soudains,

laissons les auteurs de notre étude du CNRS conclure eux-mêmes en reprenant la fin de leur communiqué de 2014 : « Dans ce contexte, il est nécessaire de produire de nouvelles études utilisant d’autres modèles et différents scénarios de développement de production d’énergie éolienne pour déterminer précisément quelles seront les conséquences d’un déploiement encore plus massif de l’éolien à l’horizon 2050. Une question essentielle sera d’évaluer les effets d’un doublement voire d’un triplement des puissances étudiées ici, s’agissant de l’ordre de grandeur envisageable dans les quarante prochaines années. »

 

Ces études devront être comparées avec celles des effets climatiques bénéfiques réels du développement éolien sur le climat, selon chaque contexte local. A long terme car les éoliennes peuvent éviter l’accumulation de CO2, mais aussi à court terme, car les effets de l’évolution des précipitations revêtent déjà un caractère d’urgence, à l’instar de ceux des températures.

 

1 https://en.wikipedia.org/wiki/Wind_power_by_country

2 https://www.nature.com/articles/ncomms4196

3 https://sciencefiles.org/2023/05/01/klimawandel-windparks-verursachen-trockenheit-und-duerre-die-belege-werden-immer-zahlreicher-neue-studie/

4 https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2215016123000055

5 https://notrickszone.com/2023/05/07/manmade-studies-suggest-that-wind-parks-cause-climate-change-even-regional-drought/

6 https://twitter.com/rioujeanpierre/status/1657324631123013634

7 https://climate.nasa.gov/news/728/texas-wind-farm-affects-land-temperature/

8 https://www.insu.cnrs.fr/fr/les-eoliennes-modifient-elles-le-climat-europeen

9 https://www.nature.com/articles/nclimate1505

10 https://link.springer.com/article/10.1007/s00382-012-1485-y

11 https://journals.ametsoc.org/view/journals/bams/94/5/bams-d-11-00240.1.xml 

12 https://acp.copernicus.org/articles/10/2053/2010/

13 https://acp.copernicus.org/articles/10/769/2010/

14 https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/8/1/015021

15 https://emi.imageau.eu/

16 https://actualite.lachainemeteo.com/actualite-meteo/2023-04-27/temperatures-caniculaires-l-espagne-et-le-maroc-en-surchauffe-des-records-de-chaleur-pulverises-66691

17 https://www.bfmtv.com/meteo/montagnes-vertes-arbres-en-fleur-les-consequences-en-images-de-la-grande-douceur-hivernale-en-europe_AN-202301050377.html

18 https://www.nature.com/articles/s41598-021-91283-3

19 https://www.mdpi.com/2072-4292/9/4/332

20 https://keith.seas.harvard.edu/publications/climatic-impacts-wind-power

21 https://keith.seas.harvard.edu/sites/hwpi.harvard.edu/files/tkg/files/climatic_impacts_of_wind_power.pdf?m=1538752648

22 https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/enr-et-co2-evite-entre-theorie-et-pratique-premiere-partie/

23 https://www.senat.fr/questions/base/2023/qSEQ230506667.html

lundi 22 mai 2023

ENR et CO2 évité, entre théorie et pratique

 

ENR et CO2 évité, entre théorie et pratique (Première partie) 

(Aller à la deuxième partie.)

ENR et CO2 évité, entre théorie et pratique (Première partie)

Première partie de l’analyse de Jean-Pierre Riou et Jean Fluchère. Aller à la deuxième partie.

Depuis 2009, la Directive européenne 2009/28/CE [1] impose à la France une part contraignante (23%) d’énergies renouvelables (EnR) dans sa consommation finale d’énergie. La justification de cette part, appelée à croitre, repose sur le postulat que chaque MWh renouvelable produit permet d’éviter les émissions de gaz à effet de serre (GES) d’une quantité équivalente à celle produite par des énergies fossiles.

Ce postulat, qu’aucune étude d’impact chiffrée ne semble jamais avoir cherché à vérifier, s’avère fondamentalement inexact en raison de paramètres essentiels qu’aucun inventaire officiel ne prend en compte.

Il apparaît en effet que le caractère erratique des productions renouvelables a pour effet de dégrader le rendement des centrales thermiques de soutien et que l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre liée à cette dégradation est occultée par les « facteurs d’émission par défaut » employés par le gestionnaire de réseau RTE, ainsi que par le CITEPA, officiellement chargé d’en transmettre l’inventaire aux différentes instances internationales.

La longueur de cet article a réclamé une publication en 2 parties :

–  1. Entre théorie et pratique.

–  2. La nécessité d’une étude d’impact.

Sa compréhension demande le rappel préalable des éléments suivants :

Note technique

Les centrales électriques thermiques transforment une partie de l’énergie consommée en chaleur, ce qui implique des pertes de rendement. Ce rendement est typiquement de 35% pour une turbine à gaz et peut dépasser 60% pour les centrales à cycle combiné à gaz (CCG).

Le facteur de charge indique le rapport entre la production effectivement délivrée sur une période donnée et celle qui aurait été produite sur cette même période si l’unité concernée avait fonctionné à sa puissance maximale, qu’on nomme puissance nominale.

Les émissions de gaz à effet de serre (GES) sont généralement exprimées en équivalent CO2 (CO2eq) en fonction du potentiel de réchauffement global (PRG) des gaz concernés.

Les facteurs d’émissions indiquent la quantité de CO2eq émise lors de la combustion d’un combustible donné, pour une unité d’énergie et un rendement donné.

Le Ministère de la Transition écologique le chiffre pour le gaz à 0,37t CO2eq /MWh en précisant pour un rendement de 55%. [2]

Toute baisse de puissance d’une centrale thermique affecte son rendement et, par là, augmente ses facteurs d’émissions, ou quantité de CO2eq /MWh.

Cette corrélation avait été notée en 2012 dans un rapport d’Enea Consulting, partenaire de l’ADEME. ([3] p 15)

Une même quantité d’électricité produite, ou de combustible consommé ne correspond pas toujours à une même quantité de CO2eq émise, selon le régime de fonctionnement de la centrale concernée.

En pratique

EDF fait état de 65% de rendement pour ses CCG contre 38% pour ses centrales classiques. [4]
L’unité CCG de Bouchain a détenu le record du monde de rendement avec 62,2% en 2018 avec notamment une température du mélange gazeux dépassant 1300°. [5]
Ces valeurs de température, de rendement et d’émissions concernent un fonctionnement à puissance nominale. Les régimes partiels affectent chacune d’elles.

ACV et RTE.

L’analyse du cycle de vie (ACV) du gaz, chiffre la moyenne européenne de son facteur d’émission à 0,244kg CO2eq /kWh. Celle-ci comprend 0,205 kg CO2eq / kWh pour la combustion proprement dite et les émissions liées à l’amont (c’est-à-dire la production et le transport du gaz) qui est de 0,0389 kg CO2eq / kWh. Avec une incertitude de 5%. [6]

L’ADEME retient 201g et 38g pour l’amont. [7]

Pour la production d’électricité, ce facteur d’émission est supérieur en raison des pertes importantes liées au rendement.

Dans ses bilans d’émissions, RTE comptabilise uniquement les émissions liées à la combustion et considère notamment nucléaire, éolien, photovoltaïque et hydraulique à 0g CO2eq /kWh.

Mais sur la totalité des cycles de vie, démantèlement compris, la dernière étude répondant aux normes ISO en vigueur fait apparaitre le nucléaire français à 3,7g CO2eq /kWh [8].

Soit exactement la valeur minimale retenue par le GIEC [9], qui retient une moyenne de 11gCO2eq/kWh pour l’éolien terrestre, 48gCO2eq/kWh pour le photovoltaïque et 24gCO2eq/kWh pour l’hydraulique, dans ce même document (p1335).

Rendement et CO2eq

Pour établir les émissions du parc électrique français, RTE fonde son calcul sur la quantité d’électricité produite par chaque combustible et chaque type de centrale, en lui appliquant un « coefficient moyen » calculé à partir de deux éléments [10]:

  • 1. La base carbone de l’ADEME pour obtenir le facteur d’émission des combustibles (gaz, charbon et fioul)
  • 2. Les guidelines de l’ENTSO-E pour définir le rendement type des centrales.

Les indicateurs retenus correspondent globalement au facteur d’émission de la combustion du gaz (205g CO2eq /kWh) appliqué aux rendements des différents types de centrales en fonctionnement à puissance nominale.

En l’occurrence la moyenne des 486g et 583g (= 534g) retenus par RTE pour les groupes gaz autres que cogénération et CCG correspond à un rendement type de 38%, tandis que la valeur de 352g CO2eq /kWh retenue pour les groupes CCG correspond exactement aux 205g CO2eq /kWh de facteur d’émission pour le gaz appliqués à un rendement de 58,2%. Soit le rendement type des CCG d’EDF (58%) légèrement relevé par le concours récent (2016) du record du monde de Bouchain (62,2%). [11]

Rappelons que pour la production électrique, le ministère avait indiqué un facteur d’émission du gaz de 0,37tCO2/MWh, en précisant « pour un rendement de 55% » [2], soit à nouveau 205g CO2eq /kWh appliqués au rendement de 55%.

En forme de confirmation le bilan RTE 2022 des émissions [12] fait état de 1,7Mt de CO2 pour le groupe fioul dont la production 2022 [13] est de 2,2 TWh et le coefficient retenu de 0,777 t CO2 eq /MWh, et de 2,8 Mt de de CO2 pour les 2,9 TWh de charbon dont le coefficient est de 0,986 t CO2 eq/MWh correspondent aux déclarés. Soit exactement la production multipliée par les coefficients respectifs sans que la moindre variation de régime ait été prise en compte.

Le CITEPA

Le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (CITEPA) est chargé de dresser l’inventaire officiel des émissions françaises et de le transmettre aux différentes instances internationales. Ses données diffèrent sensiblement de celles de RTE. Il fonde son calcul sur l’énergie fossile consommée par chaque centrale, et non sur l’énergie électrique produite, et des « facteurs d’émissions par défaut » propres à chaque combustible et chaque technologie. Le CITEPA fait état d’une marge d’incertitude entre ± 1 % et ± 300 %) » pour les facteurs d’émission (Rapport 2022 p 33 [14]).

Entre théorie et pratique

Modulation de la puissance et rendement

Si une centrale module sa puissance, notamment pour suivre la production des EnR intermittentes, elle réduit du même coup la température de combustion de ses gaz et son rendement, augmentant ainsi un facteur d’émission que ni RTE ni le CITEPA ne semblent en mesure de prendre en compte à travers leurs indicateurs de facteurs d’émissions moyens ou par défaut.

Or cette baisse de rendement entraîne une dégradation des facteurs d’émissions, voire une augmentation d’émissions, là où la comptabilité fondée sur une émission standard des MWh produits, ou même consommés, chiffrera une baisse indue globale de ces émissions.

General Electric avait publié une étude sur le sujet montrant le lien entre les régimes partiels, la température de la flamme et la quantité d’émissions dans les centrales à gaz.

Ce lien est illustré notamment ci-dessous par les rejets de monoxyde de carbone (CO), par l’étude de General Electric [15] (p 6) qui donne une image fidèle du rendement.

L‘étude indique que cette croissance exponentielle du CO intervient dès que la température descend en dessous de 816°C, correspondant au facteur de charge de 50% sur le graphique.

Ces émissions proviennent à la fois du gaz lui-même et du système de lubrification (distillate oil). Ce système pouvant comporter 40 000 litres d’huile [16].

L’étude précise enfin que cette courbe – d’une turbine à gaz MS7001EA – est caractéristique de toutes les machines à usage intensif.

Notons qu’au contact de l’atmosphère, le CO s’oxyde en CO2. (Rapport CITEPA [11] p 27).

Mais notons surtout que la diminution de puissance de cette turbine ne diminue pas ses émissions globales de CO et qu’en dessous de la ½ charge, elle les augmente même considérablement.

 

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https://www.europeanscientist.com/fr/opinion/enr-et-co2-evite-entre-theorie-et-pratique-premiere-partie/

Directives européennes vs la France d'en bas

 

Directives européennes vs la France d’en bas

Directives européennes vs la France d’en bas

Après que le charbon allemand aura contribué à faire condamner l’État français pour dépassement du seuil de particules fines PM10, le chauffage individuel au bois, première source d’énergies renouvelables en France, ne sera plus autorisé que sous certaines conditions dans 167 communes du Rhône de l’Isère et de l’Ain dès le premier avril prochain. La lutte contre les émissions polluantes de cette énergie renouvelable vient s’ajouter aux différentes mesures qui pénaliseront surtout les plus modestes.

Un seuil dépassé malgré des émissions réglementaires

Le 4 août 2021, le Conseil d’État condamnait la France [1] à verser 10 millions d’€ à l’association « Les Amis de la Terre », qui l’avait initialement saisi, pour n’avoir pas respecté les seuils limites de qualité de l’air, notamment ceux des particules fines PM10.

Un an plus tard, la France était condamnée par la Cour de justice européenne (CJUE) [2] pour n’avoir pas respecté les valeurs limites de concentration (VLC) de ces PM10 fixées par la Directive 2008/50/CE, qui sont de 40 µg/m3 en moyenne annuelle, et 50 µg/m3 en moyenne journalière à ne pas dépasser plus de 35 fois par année civile.

Dans son arrêt [3], la CJUE condamne la France pour « dépassement de manière systématique et persistante la VLC journalière pour les PM10 depuis le 1er janvier 2005 dans l’agglomération et la zone de qualité Paris », ainsi que celle de Martinique/Fort de France.

Plafond d’émissions et seuil réglementaire : 2 notions bien distinctes

Selon les données statistiques du Gouvernement [4], « La législation européenne impose, pour certains polluants atmosphériques, des plafonds d’émission par État membre, ainsi que des seuils réglementaires communs de concentration dans l’air ambiant pour la protection de la santé humaine. En 2020, treize pays dont la France respectent l’ensemble de leurs plafonds d’émission pour les cinq polluants concernés. En revanche, les seuils réglementaires de qualité de l’air pour la protection de la santé fixés pour les PM10, les PM2,5, le NO2 et l’O3 ne sont totalement respectés que par sept pays de l’Union européenne. Quatre États membres, dont la France, sont concernés par des dépassements pour les PM10, le NO2 et l’O3».

Le Programme de l’Union Européenne « Copernicus» [5] permet le suivi de la concentration des principaux polluants ainsi que leur origine, en fonction des données sur les émissions et celles de la météo. C’est ainsi qu’elle permet notamment de visualiser le dépassement des seuils, ainsi que la contribution de chaque pays dans les concentrations locales.

L’illustration ci-dessous représente la journée du 2 mars à Paris. Sur ce dépassement de seuil correspondant à 54,99 µg/m3, (en rouge) 6,15 µg/m3 provenaient de Paris même, 4,34 µg/m3 du reste de la France, soit un total de 10,49 µg/m3 pour toute la France … et 17,27 µg/m3 en provenance d’Allemagne. 

Source Copernicus
Source Copernicus

Ces situations ne sont pas rares dès qu’un épisode de froid anticyclonique affecte l’Europe, dont le vent d’Est nous ramène les émissions des centrales charbon/lignite d’Outre Rhin.

Le site Energy Charts tient à jour notamment les émissions annuelles de ces PM10 des centrales au lignite allemandes, et les chiffre à 1117,20 tonnes pour 2021 [6].

Une amélioration constante dans un contexte d’allongement de l’espérance de vie

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